BONS BAISERS DE NEW-YORK | ART SPIEGELMAN



L'autre jour, en allant voir l'expo Sempé à l’Hôtel de Ville, j'ai particulièrement apprécié le petit corridor où étaient présentées les couvertures du New Yorker et les dessins originaux qui avaient servi d'illustrations.

Je trouve assez incroyable qu'un magazine se permette encore aujourd’hui de consacrer entièrement sa couverture à une illustration, sans texte (hormis la typo du titre) ni gros titres. 
Au-delà de cet aspect graphique si caractéristique (et disons-le, plutôt audacieux et à contre-courant), je me demande même s'il existe un quelconque équivalent du New Yorker en terme éditorial...

Sans doute inconsciemment aidé par l'actualité du Festival d'Angoulême (qui ne m'a jamais intéressé tant je m'en fais l'idée d'un faux rendez-vous parisien commercial), j'ai récemment relu les deux tomes de Maus, célèbre bande-dessinée sur l'Holocauste de Art Spiegelman.




Cette bd est sans doute la plus marquante que j'ai lu, et après de nombreuses lectures et des années passées, elle vous prend avec la même force et la même stupeur.


Bref, tout ça pour dire que lorsque j'ai trouvé chez moi "Bons baisers de New York", livre offert à Claire il y a presque dix ans et auquel je n'avais jamais vraiment prêté attention,  le lien était fait entre l'expo de Sempé et mon envie récente de relire du Spiegelman.



Couverture du New Yorker après les attentats du 11 septembre 2001. Spiegelman habite à moins de deux kilomètres de Ground Zero et revient largement sur l'histoire de cette couverture.


Dans "Bons baisers de New York", Art Spiegelman revient sur les dix années durant lesquelles il a collaboré avec le New Yorker, décrivant comment Maus lui avait ouvert les portes de cette institution médiatique.

Le livre est aussi l'occasion de comprendre comment se "crée" ces fameuses couvertures, de voir ainsi comment évolue une idée, un simple croquis, et de voir aussi les couvertures refusées ou les projets abandonnés. Spiegelman revient d'ailleurs avec précisions sur les nombreux désaccords et refus qu'il a essuyé de la part de la direction du journal.

Évidemment, il ne s'agit en aucun cas d'un livre "à charge", au contraire y transparait une évidente ouverture et liberté qui caractérise cet hebdomadaire.


Couverture sur l'affaire du "Monica Gate"

Couverture refusée et parue dans la rubrique "Carnet de Croquis" du New Yorker, 15/03/99


Le  dessin reproduit ci-dessus a été refusé par le directeur de la rédaction de l'époque David Remnick, mais est magré tout paru dans les pages intérieures du journal. 

Spiegelman s'en explique :

"Je ne regardais jamais la cérémonie des Oscars à la télévision, plaisir "coupable" de nombreux de mes amis. Mais le jour où, en 1999, La vie est belle de Roberto Benigni fut couronné, mon intérêt devint très vif pour ce film, réduction sentimentale et très confuse de "l'Holocauste" en métaphore d'un "mauvais trip", d'un "sale moment" que l'imagination et le sens de l'humour pouvaient rendre supportable. Après Maus, j'avais soigneusement veillé à ne pas me poser en arbitre de l'HoloKitsch, mais je me sentis personnellement concerné quand je lus que Benigni s'était inspiré de mon livre. Mon nouveau patron, David Remnick, n'avait pas envie de montrer en couverture une victime émaciée d’Auschwitz tenant un oscar. Mais il accepta que mon dessin paraisse à l'intérieur, à la rubrique Carnet de croquis, accompagné d'une citation extraite de la publicité du film : "Devenez un acteur de l'Histoire et du film étranger le plus couronné de tous les temps" (je garde toutefois la nostalgie de ma légende originale: "Je remercie tout ceux sans qui rien de tout cela n'aurait été possible...".

Cette dernière phrase est à l'image de l'humour et de la perspicacité qui se dégagent de ce livre. Chaque page recèle d'anecdotes et l'écriture de Spiegelman est vraiment agréable à lire.

Une référence indispensable pour ceux qui apprécient son travail. 


 

2 commentaires:

office !!!! a dit…

c'est cool !

nous on est abonné au new yorker ! c'est le meilleur hebdomadaire !!!

alainberlin a dit…

il y a quand même moins de photos que dans GALA